L'édito du n° 77
Estampes et Années folles
Drôle de titre pour un édito, me direz-vous. Les estampes n’ont a priori strictement rien à voir avec les Années folles. Les premières concernent l’imagerie du XVe au XVIIIe siècle, voire du XIXe si on y inclut les lithographies. Les secondes eurent une durée de vie beaucoup plus courte circonscrite aux lendemains de la première guerre mondiale et sombrèrent avec la crise de 1929. Seul le hasard de la composition de ce numéro les fait se croiser pour la seconde fois de leur existence. La première eut lieu en 1926 lorsque, tandis que le Casino de Châlons faisait vivre les Années folles sur scène, le Musée municipal mettait en scène une exposition d’une partie de ses collections d’estampes. La Bibliothèque et le Musée d’aujourd’hui, qui à l’époque ne formait qu’une seule et même institution, nous proposent de les redécouvrir et y consacrent un impressionnant catalogue d’exposition.
Aujourd’hui, le Casino, rebaptisé un temps Cinéma Bernard-Blier, n’existe plus et, hormis quelques photos jaunies ayant remplacé les estampes d’antan, son souvenir s’estompe peu à peu dans la mémoire collective. Nul musée ne viendra collecter ces images fugitives qui parfois effleurent encore nos esprits et nous rappellent qu’il fut le dernier cinéma de centre-ville qu’ait connu Châlons. Né avec le cinéma muet, il est mort sans connaître le succès de «The Artist». Demain, les générations futures qui passeront devant sa façade conservée pour servir d’accès à une résidence de luxe s’en souviendront-elles ? Comme, sans doute, la nôtre s’agissant de l’époque des Années folles lorsque le Casino était une salle des fêtes où le cinéma n’était qu’une de ses activités. Ce numéro vient à point pour rafraîchir nos mémoires.
Notre dernière assemblée générale nous en donna aussi l’occasion, en nous remémorant les 20 années que nous avons déjà consacrées au service de la Catalaunie. Furent-elles sages ou folles ? A vous de juger, de les estampiller et de les cataloguer en votre âme et conscience.
Pour notre part, c’est avec nos tripes que nous avons réagi à l’appel à la mobilisation lancé par RESF, Réseau Education Sans Frontière, afin d’obtenir le retour du jeune Blendon, hémiplégique, expulsé de France sans ménagement avec sa famille. Qu’ont-ils fait de répréhensible ? Ils sont coupables d’être persécutés dans leur pays d’origine sans que cela puisse leur valoir le statut de réfugiés. Ils sont surtout et avant tout victimes d’une politique honteuse ayant pour seul objectif l’expulsion en 2012 d’un nombre d’étrangers équivalant à la population d’Epernay pour séduire l’électorat du FN et tenter de reconquérir l’opinion en stigmatisant les faibles, les victimes de la crise et les exclus.
Le dernier sujet de ce numéro est tout aussi éloigné des estampes et des Années folles. Il s’intéresse au développement durable de la Catalaunie avec la mise en route de l’Agenda 21 du territoire de Châlons et du PCAER, le Plan Climat Air Energie Régional actuellement en débat. Tous deux ont un volet protection du patrimoine que nous avons exploré. Celui de l’Agenda 21, qui y voit une menace pour le développement durable, est inacceptable.
Sabine Schepens
rédactrice en chef